Textes profonds et mélodies planantes, AaRON est de retour avec un nouvel album. Quelques semaines après la sortie de "We Cut The Night", europe2.fr est allé à la rencontre de Simon Buret et Olivier Coursier pour un entretien passionnant.
Effervescence à la Cigale, le MaMA Festival s’apprête à donner son coup d’envoi pour trois jours de musique et de découvertes. En coulisses, le groupe AaRON -formé par Simon Buret et Olivier Coursier- vient de terminer les balances et discute des derniers ajustements de setlist avant de nous recevoir dans sa loge. Le 18 septembre dernier, le duo publiait We Cut The Night, un nouvel album profondément puissant et aérien. Les deux artistes ont pris le temps de voyager et de s’évader, avant de se retrouver lorsque l’envie de recomposer ensemble s’est imposée d’elle-même. « Simon avait une bonne maquette de « Blouson Noir » et il me l’a faite écouter un jour où on s’est revus, commence Olivier Coursier, qui officie en tant que compositeur, pianiste et guitariste. Moi j’avais des choses de mon côté, et sans même s’en être parlé avant, ça correspondait l’un et l’autre à ce qu’on voulait faire pour le futur album. On avait vraiment la même envie, alors tout est venu très naturellement. C’est génial que les gens soient encore curieux de connaître notre travail. Et puis, c’est un troisième album qu’on vit vraiment comme un premier. »
« Chacun de nos albums est un instant qu’on essayait de figer en musique. »
Le résultat est un disque à l’énergie lumineuse et planante, et le duo nous transporte toujours plus loin par son sens incroyable de la mélodie. Une nouvelle fois, AaRON a fuit les conventions et s’est réinventé pour construire des titres bruts et saisissants, dans lesquels chaque mot est porté par la musique mais aussi par les silences. « We Cut The Night, c’est une métaphore pour illustrer l’idée de couper la solitude, enchaine Simon Buret. Je pense qu’on est tous seuls sur cette terre, ensemble. La musique relie à l’autre et crée des liens entre les êtres. Cet album parle donc de la nuit intérieure qu’on a ramenée à la lumière. » Toujours attiré par l‘inconnu, le groupe cherche à retranscrire en musique les émotions les plus profondes et à faire fusionner les sensations musicales avec la poésie des textes. « Quand j’écris, j’aime travailler sur les pleins et les déliés, comme ce qu’on fait en musique d’ailleurs, laisser des silences et des choses inexpliquées pour que les gens puissent se l’approprier, raconte le chanteur. J’ai besoin que les gens en fassent une interprétation double. J’adore les métaphores, je suis influencé par des gens comme Albert Cohen ou Tomas Tranströmer, ces grands auteurs qui ont une façon de faire sonner les mots et les émotions d’une manière brute qui leur appartient. » Conçu comme un voyage entre le clair et l’obscur, ce troisième album se démarque par sa diversité. Des morceaux mélancoliques et berçants, portés par des rythmes lents, d’autres beaucoup plus dansants et lumineux.
« Je pense que lorsqu’on écrit, il est très important de rester connecté à son cœur à soi. »
La musique d’AaRON est à leur image : authentique et emplie de sensibilité. « Ce qui nous motive, c’est de créer une sensation. On ne veut pas faire des chansons heureuses ou malheureuses, qui donnent envie de baiser ou de danser, c’est pas ça l’idée. Ce sont des chansons vivantes et j’aime bien l’idée qu’il se passe quelque chose, comme un tableau doit déclencher une émotion. Mais on ne guide pas l’autre, on le laisse interpréter comme il le veut. C’est l’auditeur qui crée la chanson et la sensation qui s’en dégage. Parce qu’il va prendre le morceau et le colorer de son émotion, de sa vie. C’est ce qui m’intéresse. » Doté d’une réelle puissance, We Cut The Night joue sur les textures de sons et les rythmiques aériennes, et enveloppe son auditeur d’une atmosphère poignante. Envoûtante à souhait, la voix de Simon Buret nous guide au milieu des grands espaces et du chaos urbain. Pour le titre « Blouson Noir », dont le clip vient de sortir, les deux musiciens se sont d’ailleurs inspirés de l’énergie lumineuse et l’hyper urbanisme des grandes villes. Réalisée par Olivier Coursier, la vidéo a été tournée à Los Angeles, plus précisément à Venice Beach. « C’est une espèce de paradis perdu où on voit tous les freaks du monde. C’est magnifique et en même temps désolant, avec ces gens qui tournent le dos à la beauté qui les entoure, qui sont dans leur propre monde, explique Simon Buret. Et puis il y a cet homme qui est à la fois complétement risible et magistral, et qui fait du roller comme personne. Il dégage une telle puissance, comme une pulsion de vie au milieu du vide et de l’abandon. »
« On voulait montrer ce côté urbain qui parfois peut paraître très dur, mais qui est à la fois très poétique, d’une certaine manière, ajoute Olivier Coursier. Ça dépend ce que tu en fais et de comment tu le vois. » Si l’album évoque la solitude et les errances nocturnes, les textes font surtout référence à la nuit intérieure et aux sensations qu’elle procure. « J’ai toujours adoré la nuit, l’inconnu. Le masque social disparaît vraiment et les rencontres que tu fais la nuit sont forcément plus éclairées que celles que tu fais la journée, souligne Simon Buret. La grande liberté vient la nuit. Les grandes angoisses aussi, mais surtout les grandes euphories, les grandes décisions. Tu as cette illusion d’être seul au monde et d’être un conquérant. Nous, ce dont on parle dans notre album, ce n’est pas du tout une nuit dark ou glauque. On parle d’une nuit éclairée, de ce moment de liberté qu’on t’octroie dans les grandes villes. Je pense que dans cet album, il y a une grande pulsion de vie, jaillissante et sulfureuse. On voulait un album enveloppant, qui puisse, en fonction du volume sonore auquel tu l’écoutes, te créer différentes sensations. » AaRON est actuellement en tournée dans toute la France, avec un passage à l’Olympia de Paris le 25 novembre.