Quelques jours avant de se produire à l'Accor Arena, Juliette Armanet s'est confié au micro d'Europe 2.
Il y a des albums intemporels, des albums qui, inévitablement, s’imposent sans effort. C’est le cas de Brûler le Feu, album signé Juliette Armanet. Porté par des singles efficaces tels que Le Dernier Jour du Disco ou encore Tu Me Play, le second opus de l’artiste a littéralement confirmé le talent et la musicalité de l’artiste. Face à son succès, l’interprète de Flamme nous a notamment offert une réédition – intitulé Brûler le Feu 2.
Quelques jours avant sa performance tant attendue à l’Accor Arena, Juliette Armanet a fait escale chez Europe 2 pour mieux évoquer ce flamboyant chapitre de sa carrière, ses premiers pas dans l’industrie musicale et, pourquoi pas, un potentiel concert au Stade de France.
Brûler le Feu 2 est sorti il y a quelques mois, qu’est-ce que tu retiens de tout ce chapitre ?
Juliette Armanet : C’est un disque très orchestral, très exalté – rien que le titre, Brûler le Feu, il y a un côté Peplum. Brûler le feu 2, ca donne un côté saison 2, le retour. C’est un disque très exalté, c’est un disque sur le désir. Il y a vraiment cette métaphore du feu qui est partout, partout, dans le disque – avec la flamme, le briquet, le rouge… c’est un disque sensuel donc je crois que ça m’a appris, ça m’a libérée de plein de trucs. Sur scène, je me sens très différente de (celle que j’étais) sur la première tournée. Plus déployée, ça boxe plus… plus exaltée peut-être.
Il y a une certaine vulnérabilité dans le fait d’écrire et de travailler ses chansons. Est-ce qu’il y a parfois des moments d’hésitation ?
De toute façon, dans tout processus de création d’album, tu passes ta vie, ton temps à te dire ‘Ah, c’est pourri’ ou ‘Ah, ça tue’. Tu es tout le temps incertaine de savoir ce qui était bien, ce qui ne l’était pas. Par contre, il y a certaines chansons, quand tu les écris, tu te dis ‘ça, il ne faut pas que je la lâche parce que celle là, elle a du sens, quoi. Il y a un truc, il y a un vrai fil à tirer’. Mais après, un process d’écriture, c’est de passer d’un extrême à l’autre en permanence. C’est dur de finir l’écriture et de se dire ‘allez, ça y est, c’est sur, cette fois, c’est fini’. D’ailleurs, quand tu commences l’écriture d’un disque, tu ne sais jamais à quoi ça va ressembler… c’est toujours assez déroutant quand tu termines en te disant ‘ah, c’est ça, c’est donc ça’ !
Comment aborde t-on un show donné sur une scène telle que celle de l’Accor Arena ?
A vrai dire, je crois que je vais surtout essayer de rester en vie ! Le côté gigantesque, grand monstre comme ça, peut sembler très très effrayant mais ce qui me rassure, c’est de me dire que chaque personne qui vient dans cette salle a une raison bienveillante d’être là – une raison personnelle, telle ou telle chanson qui évoque quelque chose ou résonne avec une histoire. Ce que j’espère que le plus, c’est que le concert, malgré le côté gigantesque, puisse garder de l’intimité, que je puisse réussir à toucher chaque personne. Alors, il y aura des personnes grandes comme ça (très petites, vues de loin, ndlr) dans mes yeux mais j’essaierai de les atteindre.
» Ca a pris 10 ans pour rencontrer le public, pour se frayer un chemin, s’épanouir, s’ouvrir vraiment à ça »
Est-ce que tu verrais faire un stade de France un jour ?
Un Stade de France, wow ! Je dis oui à tout. Donc, évidemment ! Non mais, un stade de France… en fait, je suis contente de vivre ça à mon âge parce que j’ai 39 ans et ça a mis beaucoup de temps à se faire. J’ai retrouvé récemment une « archive », une video de L’amour En Solitaire et c’était quand même il y a 10 ans. Ca a pris 10 ans pour rencontrer le public, pour se frayer un chemin, s’épanouir, s’ouvrir vraiment à ça. Donc, j’aime bien l’idée que ça ait pris du temps, ça a été long à construire, cette histoire. Ca ne s’est pas fait comme ça, genre succès fulgurant sur un titre. Ca a été une vrai cathédrale, pierre après pierre ! Je ne dirais pas que je me sens sereine avec ça aujourd’hui mais comme il y a eu toutes les étapes (que j’ai bien vécu les unes après les autres, il y a eu beaucoup de travail), j’ai l’impression d’être à un endroit où ça me fait très très peur et en même temps, je me dis que j’espère être capable de le faire. Je pense pouvoir y arriver.
En tant que femme, comment as-tu évolué dans cette industrie ?
Toute l’histoire que je vis, il y a mon visage dessus mais c’est une histoire d’équipe : il y a évidemment ma manageuse qui est là depuis 10 ans, il y les gens qui travaillent autour du projet ; ce qui est sûr, c’est que moi j’ai toujours cherché à me protéger et à beaucoup protéger ma vie intime pour avoir une vraie frontière. Comme ça, ce que je vis moi n’appartiens qu’à moi. Et voilà, j’ai eu un enfant, j’ai essayé de maintenir un cap pour que dans toute cette vie de musique –qui prend déjà une bonne partie de ma vie- je puisse avoir un moment où je puisse fermer la porte. Me dire, ‘voilà, je rentre chez moi, je vais faire une soupe au potiron et je vais regarder un dessin animé avec mon petit’. Donc, se protéger du reste. Et puis, je vois de plus en plus de femmes frayer leur chemin, diriger des équipes, produire leurs propres albums… Je pense qu’on est une génération qui a fait bouger les choses et que les musiciennes qui arrivent ne sont plus du tout dans le même contexte que celui dans lequel j’ai commencé et tant mieux !
« Le succès ne va pas sans une certaine noirceur »
Si tu devais piloter ton propre documentaire, que voudrais-tu raconter ?
Ecoute, si j’avais la réponse, ça pourrait m’aider ! Justement, j’ai fait du documentaire pendant des années donc c’est vrai que j’aurais du mal à faire un documentaire sur moi. C’est le principe du documentaire justement, c’est d’aller chercher les autres. En tout cas, je pense que ce qui est compliqué dans le fait de faire un documentaire sur ce que l’on vit, c’est qu’il y a plein de trucs que l’on cache : tous les moments où ça ne va pas, tout les moments où l’on doute, tous les moments où l’on pète des plombs, où l’on est épuisé… parce qu’il y en a plein en fait, des moments comme ça. Derrière tout ce qui brille et tout ce qui marche, il y a forcément la monnaie d’une pièce. Le succès ne va pas sans une certaine noirceur. Donc je pense que c’est aussi intéressant de raconter ça et de parler du fait que d’avoir ces vies là, ce ne sont pas que des vies au soleil. Il y a aussi toute une part d’ombre et de doutes et je pense aussi que l’on en parle plus – de nos psychologies d’artistes. Et c’est très bien.