L’artiste français, qui a remporté le prix de la révélation masculine aux Victoires de la Musique 2021, sort ce 31 mai un troisième album intitulé « adrénaline » aux influences très anglaises.
Hervé et l’Angleterre, une histoire musicale qui dure depuis presque 10 ans ? Oui. Car à ses débuts, en 2015, le Français est dans un groupe avec un pote anglais, Dennis. Le projet électro s’intitule Postaal, les deux garçons vivent entre Paris et Londres et une petite hype se forme autour du groupe.
Neuf ans plus tard, on retrouve Hervé avec un troisième album solo. De la bière a donc coulé sous les pubs. Mais par contre, le Royaume-Uni fait toujours partie de sa vie, de son histoire. La preuve : l’album adrénaline a été enregistré dans la ville de Brixham, dans le sud de l’Angleterre. Avec des groupes comme Pulp, T-Rex, New Order, Primal Scream ou encore Sleaford Mods dans les écouteurs.
Hervé comme Victoires
Comme de nombreux gamins, Hervé voulait devenir footballeur professionnel. Mais le Français, qui a grandi à Fontenay-le-Fleury (entre Versailles et Trappes), découvre un jour le piano. Il y a un premier essai vers l’âge de 12, mais il n’arrive pas à comprendre la logique de cet instrument. Il retourne sur les terrains de foot puis remet ses doigts sur un piano quatre ans plus tard. Il apprend alors ses premiers accords et commence à composer ses propres mélodies. Hervé écoute alors autant Higelin et Bashung que les Daft Punk ou le 113. En 2015, après avoir enchaîné les petits boulots, il lance le projet Postaal. Ce sont les premières scènes, les premières interviews, les premiers pas.
Trois ans plus tard, Postaal est déjà de l’histoire ancienne pour Hervé. À 27 ans, il entame une carrière solo sous son nom, sort deux morceaux (Mélancolie FC et Va Piano) puis part en tournée pour faire les premières parties d’Eddy de Pretto. La machine hyperactive est lancée à 10 000 km/h sur l’autoroute du succès : premier EP — avec une superbe reprise de La Peur des Mots de Bashung dessus — puis premier album Hyper en 2020 qui rafle tout sur son passage. Car Hervé, avec son esprit DIY, son sens de l’écriture inspiré par les paroliers de Bashung, ses influences britanniques et sa voix cassée, détonne dans le paysage musical. Résultat : le 12 février 2021 il repart des Victoires avec un trophée. Magazines, plateaux de télévision, concerts complets : Hervé vit un rêve éveillé.
Un disque à la sauce UK
Mais dans l’industrie musicale, les artistes en plein succès peuvent vite être laissés sur le carreau si le vent tourne dans la mauvaise direction. Avec Intérieur Vie, Hervé rate la marche, et sort un deuxième album mitigé. C’était donc le moment d’initier un changement, de quitter Paris ou la Bretagne pour traverser la Manche, et de se nourrir de l’ambiance des pubs et des sonorités UK pour écrire et enregistrer ce troisième album. Un « retour aux sources » pour le Français qui a connu ses premières scènes en Angleterre, où il a signé sur son premier label et où son amour pour la musique s’est construit.
Sur adrénaline, les influences britanniques sont donc présentes, mais dans l’esprit plus que dans les musiques. On explique : ce qu’Hervé avait en tête, c’était l’idée d’aller faire un album en Angleterre en étant immergé dans cette culture — la musique, le foot, le pub, etc. Certes, le Français adore plusieurs artistes britanniques (dans le rock, la folk aussi, l’acide house, etc.) et s’en inspire. Mais il garde toujours en tête que sa musique ne sera pas non plus un copier-coller de ses idoles. Déjà parce qu’il chante en français. Et puis parce que l’intérêt d’un disque où toutes les chansons sonneraient comme des reprises de Pulp serait peu enthousiasmant.
C’est pourquoi Sémaphore, une folk song en douceur, n’a rien d’un titre qui aurait pu passer en soirée à l’Hacienda — un mythique club de Manchester fondé par le label Factory et des membres de New Order. C’est pourquoi Moins une est un retour aux sources d’Hyper. Et c’est pourquoi CLASHHH! sonne comme un tube français des années 80 (genre Chagrin d’amour).
Ceci étant dit, quelques pointes d’inspiration UK se sont glissées subtilement sur l’album. Tube de l’été a des airs du Common People de Pulp, Comme tout le monde est un boogie à la T. Rex ultra efficace, la prod d’Odeur pourrait facilement se retrouver sur un disque des Sleaford Mods et Rien de personnel ressemble à une ballade de The Verve. Les fantômes de Jarvis Cocker ou Richard Ashcroft l’aideront-ils à retrouver le chemin des Victoires de la Musique ?
Crédit photo : © Lorelei Buser Suero