Véritable phénomène depuis son arrivée sur Netflix, La Casa de Papel s’est fait une place de choix dans la sphère télévisuelle. Avec un scénario haletant et ses coups de théâtre à n’en plus finir, le show espagnol a littéralement conquis le monde entier. La recette ? Une équipe badass qui deviendra un symbole de la pop culture, un plan (presque) parfait et une façon bien à elle de combattre le patriarcat.
Dès la première saison, les femmes occupent une place de choix : Tokyo, narratrice, est le tout premier personnage présenté au public (« Je m’appelle Tokyo », entend-on dès les premières minutes). Tokyo entame le récit, elle est le lien entre le téléspectateur et les braqueurs. Dire qu’elle est le visage du show serait (presque) un euphémisme. Bref, La casa de Papel a fait le choix audacieux de donner la part belle à des personnages féminins dans un contexte, une ambiance et un milieu qui, vous l’aurez compris, transpirent la testostérone. Alors que Nairobi est la première à se rebeller contre le patriarcat instauré (on se souvient du coup d’état magistral qui évincera Berlin pour mieux lancer le matriarcat), c’est Raquel, une femme, qui en parallèle, prend en charge des négociations.
- « Que le matriarcat commence » – Nairobi
Dans la première saison, Tokyo traverse un barrage de policiers perchée sur une moto, Nairobi recadre Berlin plus d’une fois et Raquel, elle, se mesure autant à sa hiérarchie parfois archaïque qu’à son ex-mari violent. Dans la Casa de Papel, les femmes prennent de la place et c’est tant mieux. Même Berlin, pourtant montré comme la personnification de la misogynie finira par s’incliner : on se souvient qu’avant de se sacrifier le leader parfois border lâchera un « les femmes et les homos d’abord » qui laisse penser qu’il ne sortira pas vivant de la fabrique.
Il faudra attendre la troisième partie pour voir ce combat féministe vraiment prendre forme : difficile d’oublier la tirade de Monica qui, excédée tentera de faire comprendre à Denver qu’elle a sa place sur ce braquage : « Écoutes, moi. Je suis une femme, une mère et une braqueuse. Avoir un enfant n’implique pas de renoncer au reste. Tu es père et tu n’envisages pas de ne pas le faire… […] P*tain de sexiste », lâchera t-elle avant que Nairobi ne s’en mêle : « Le patriarcat est invivable ici « ! On vous passe les détails mais, il faudra l’intervention du professeur (aussi neutre que la Suisse) pour calmer le jeu.
Dans la banque, Toyko se fait un plaisir de flanquer son pistolet dans la bouche de Palerme : « Je ne parlerai plus de la ch*tte de mes collègues », lui fera t-elle répéter plusieurs fois. Côté négo, c’est Alicia, enceinte jusqu’aux yeux qui, cette fois, prend le pouvoir autrefois détenu par Raquel. Bref, cette troisième partie confirme que le féminisme est bien présent dans le show… malgré quelques ratés : le corps de Tokyo est (encore et toujours) sexualisé tandis que le professeur, habitué à jouer ses « parties d’échecs » en solo aura bien du mal à faire équipe avec Rachel, devenue Lisbonne. On pourrait parfois tiquer, certes, mais comme le souligne Itziar Ituño, « il n’est pas question que La Casa de Papel soit en retard sur les questions de lutte pour l’égalité ». Mieux, les équipes attendent d’être alertées « sur chaque point que vous avez remarqué, car nous sommes majoritairement des hommes, et très souvent nous ne sommes pas conscients de tout cela ». Et ça, c’est toujours bon à prendre.
- Six fois où les filles ont été badass
Alors évidemment, il n’y a pas que ça : on aurait pu passer des heures à disséquer le discours de Nairobi à Tokyo (« Tu es une femme libre ! »), comme on aurait pu revenir sur sa façon de démonter point par point le motto fétiche de Palerme, Boom Boom Ciao. Pendant que le nouveau leader préfère prendre la fuite plus vite qu’un Pokémon effrayé, Nairobi, elle, porte ses ovaires et dit ce qu’elle ressent comme ça, au milieu d’une prise d’otage. On aurait pu aussi applaudir Monica qui, enfin, après avoir été abusée physiquement (et moralement) par Arturo, finit par lui mettre la balle qu’il mérite (avouez, on l’a tous pensé).
Et justement, en parlant de femmes de caractère, parlons d’Alicia. Alors d’accord, on a tous eu envie de l’étriper. D’accord, elle n’a pas toujours été le personnage de l’année. Mais Alicia accouche au beau milieu d’un hangar, entourée des criminels que, on le rappelle, elle est venue stopper. Petit bonus, elle enverra Marseille faire le shopping de sa fille à peine née. Alicia normalise ici l’accouchement et montre que non, ce n’est pas aussi rose que dans une telenovela et que oui, être une femme, ne rime pas toujours avec paillettes et confettis.
Enfin, cette cinquième partie se termine en apothéose (il est trop tôt pour dire « en feux d’artifices ? ») avec le sacrifice de Tokyo. Qui a le cran de se faire sauter en emmenant Gandia avec elle ? Tokyo. Qui ne pose jamais les armes ? Encore et toujours Tokyo. Au delà-du choc (et du deuil mondial qui suivra), Tokyo a, dans un ultime acte désespéré prouvé que sans les femmes, l’équipe n’aurait même pas tenu une heure. Qui sait, peut-être que dans les prochains épisodes le matriarcat prendra vraiment la place qu’il mérite.