Comme beaucoup d’enfants des années 90, j’ai littéralement grandi avec Harry Potter. Je fais partie de cette génération qui a découvert le plaisir de la lecture grâce aux mots de JK Rowling. De ceux qui visionnaient les DVD des films en boucle le mercredi après-midi jusqu’à pouvoir réciter les répliques par coeur. De ceux aussi qui quinze ans plus tard, relisent encore et encore la saga intégrale parce que « ça fait toujours du bien ». Alors forcément, à l’annonce de cette nouvelle histoire basée sur les aventures de Newt Scamander, j’étais partagée entre excitation et inquiétude. « Ils tenteraient pas de nous prendre un peu pour des pigeons Warner là ? Ils n’oseraient quand même pas ruiner l’histoire de notre enfance en nous pondant un scénario à deux balles simplement pour faire grossir les chiffres ? » Et puis on apprend que JK Rowling écrira elle-même le scénario, que David Yates reprendra une nouvelle fois les commandes après avoir réalisé les quatre derniers films. Même les photos du film diffusées à quelques jours de la sortie semblaient de bon augure. Mais quand même, en me rendant à la projection des Animaux Fantastiques, je me sentais un peu comme Harry avant la finale de la Coupe de Quidditch : complètement euphorique à l’idée de retrouver ce terrain de jeu que j’apprécie tant, tout en redoutant l’affreuse déception en cas d’échec cuisant. Finalement dès les premières minutes des Animaux Fantastiques, la magie opère et on retrouve avec émerveillement cet univers qu’on n’a jamais vraiment quitté. Pourtant, on débarque plus ou moins en terres inconnues : nous voilà à New York en 1926 en compagnie de Newt Scamander, jeune magizoologiste britannique. Vaguement familier pour les lecteurs de Harry Potter puisqu’il est l’auteur d’un des livres scolaires des jeunes sorciers de Poudlard, Newt incarne le lien entre les deux histoires.
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Ce précurseur écologiste de la communauté magique étudie les animaux fantastiques qu’il rencontre et les conserve dans sa valise ensorcelée pour les protéger et faire perdurer les espèces. Aussi drôle que touchant, l’acteur Oscarisé Eddie Redmayne incarne à la perfection ce sorcier à l’air constamment hagard, bien plus à l’aise avec les bêtes magiques qu’avec les humains. De passage à New York, il voit ses plans voler en éclats lorsqu’un No-Maj (un Moldu américain) libère par accident plusieurs des créatures contenues dans sa valise. Pour limiter les dégâts et sauver ses chères bestioles, Newt se lancent à leur recherche. Cambriolages dans une bijouterie pour récupérer son Niffleur intrépide et course poursuite avec un Eruptif pas franchement sympathique au milieu d’un Central Park enneigé… Newt risque sa peau à plusieurs reprises et ne doit sa survie qu’aux personnages tous plus ou moins marginaux qu’il croise en chemin. On rencontre ainsi Jacob Kowalski (Dan Fogler), le No-Maj qui se retrouve par hasard au beau milieu d’une aventure qui le dépasse complètement. Ses expressions interloquées font de lui un personnage tendre et plein d’humour, auquel on s’identifie rapidement. L’ex-Auror Tina Goldstein (Katherine Waterston), prête à tout pour récupérer son poste, sera également d’une aide précieuse dans la chasse aux créatures. Quant à sa charmante sœur Queenie (Alison Sudol), elle est dotée de pouvoirs de Legilimentie, ce qui donne lieu à de nombreuses scènes assez cocasses.
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Fraîchement débarqué aux Etats-Unis, Newt découvre alors une Amérique en pleine prohibition où les sorciers sont forcés de cohabiter en toute discrétion avec les Moldus américains. Alors que des phénomènes inexpliqués se multiplient à New York, le groupuscule des Fidèles de Salem tentent de convaincre la population de l’existence de la magie et transmet sa haine des sorciers aux enfants. Ezra Miller, impeccable dans le rôle de Credence, campe un jeune homme torturé et complexe qui reflète le mal-être de ceux qu’on oblige à vivre cachés. Pour présider le MACUSA (le Congrès Magique des Etats-Unis d’Amérique), JK Rowling a choisi une femme à la peau noire, Séraphina Picquery (Carmen Ejogo), qui tente tant bien que mal de cacher le monde des sorciers aux yeux des Moldus. Quant à son bras droit Percival Graves (Colin Farrell), il souhaite imposer la domination des sorciers sur les Moldus « pour le plus grand bien ». Aussi, sachez que si vous comptiez vous rendre au cinéma en pensant voir un sympathique petit film sur les gentilles créatures qui peuplent le monde des sorciers, vous risquez d’être surpris. Parce que dans le genre glauque, Les Animaux Fantastiques ne fait pas dans la dentelle. Tout en finesse, ce premier volet pose doucement les bases d’une époque dramatique, qui mènera au légendaire affrontement entre Albus Dumbledore et son amour de jeunesse, le mage noir Grindelwald (Johnny Depp). Si JK Rowling a toujours semé habillement des références au nazisme (les Sang-de-Bourbe) ou encore à l’esclavage (les elfes de maison), l’aspect politique est plus que jamais exploré, mettant en lumière les dangers du repli sur soi et l’utilisation de la paranoïa et de la peur de l’autre pour contrôler les foules. Un message universel qui, quelques jours après l’élection de Donald Trump, résonne d’autant plus fort.
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Bourré d’action et de rebondissements, le film montre les comportements extrêmes qu’adoptent les gens face à la peur de l’inconnu. Et si les animaux fantastiques apportent un souffle de légèreté à l’ensemble, on est loin de l’univers enfantin du premier Harry Potter. Certes, les images de synthèse risquent fort de mal vieillir, mais les effets spéciaux sont à couper le souffle et les créatures magiques plus vraies que nature. A tel point qu’on songe sérieusement à ajouter un Niffleur sur notre liste de Noël. L’intrigue ayant été écrite pour le cinéma, on évite une énième frustration concernant certaines scènes coupées, comme ce fut le cas à de nombreuses reprises pour les films Harry Potter. Et bien que les sept tomes de la saga de JK Rowling permettent de comprendre toutes les subtilités de l’histoire et d’établir le lien avec le monde des sorciers moderne, il n’est pas nécessaire de connaître l’univers pour apprécier le film. Les Animaux Fantastiques parvient avec brio à donner un nouveau souffle au monde magique et à lui apporter bien plus de profondeur, tout en conservant l’ambiance typique qui a fait le succès de la saga. Le génie de JK Rowling réside aussi dans sa faculté à adapter ses histoires à son public et à évoluer avec lui. Les Animaux Fantastiques 2, prévu pour 2018, se déroulera à Paris et devrait s’intéresser de plus près à Grindelwald, incarné par Johnny Depp. Bien décidé à imposer la domination des sorciers sur les Moldus, le dangereux mage noir continuera son ascension vers le pouvoir. Vous l’aurez bien compris, Les Animaux Fantastiques marque le début d’une nouvelle saga qui a encore de nombreux secrets à livrer…