C’est souvent à l’adolescence que les goûts musicaux de chacun s’affirment, dans cette période parfois compliquée où les émotions sont décuplées, et où on a souvent l’impression que les chansons qu’on écoute ont été écrites pour nous. Pour Nilüfer Yanya, une Londonienne aujourd’hui âgée de 29 ans, cette période a été marquée par plusieurs groupes de musiques qu’elle écoutait en boucle sur son iPod (oui). Sur son baladeur, la jeune fille avait téléchargé des albums de sa grande soeur et bingo : elle est tombée amoureuse de cette discographie où l’on retrouve les Strokes, Les Libertines, Radiohead, The Cure, les Pixies ou encore Elliott Smith.
À 12 ans, Nilüfer commence la guitare puis décide assez rapidement de ne pas chanter comme une fille pour éviter que ça sonne « jolie », comme elle l’a raconté au magazine New Yorker. À 15 ans, la jeune londonienne poste ses chansons sur SoundCloud et se fait repérer pour intégrer un groupe de pop fondé par Louis Tomlinson de One Direction. Mais l’Anglaise décline l’offre : elle a une autre idée en tête.
Fusion des genres
Nilüfer Yanya se fait connaître grâce à une reprise des Pixies postée sur la toile. Le morceau s’intitule Hey et montre à la fois sa dextérité musicale et une voix déjà à part, déjà maîtrisée et déjà mature. Celle qui a appris à faire sonner sa six cordes avec Dave Okumu (un guitariste qui a notamment joué avec Amy Winehouse) va alors rapidement enchaîner les EPs avant de s’atteler à son premier album en 2019 : Miss Universe. 17 morceaux difficilement classables qui rendent hommage au rock alternatif des années 90 et 2000 tout en prenant des directions plus risquées, s’aventurant vers le jazz, la soul, le trip hop ou encore la musique expérimentale. Sa voix, assumée, puissante et subtile, donne du relief aux morceaux, à l’instar d’un King Krule ou d’une Amy Winehouse.
Un nouvel album pour bientôt
Pour son deuxième album Painless (2022), l’Anglaise est un peu attendue. Le disque, plus direct, plus nerveux et plus sombre que le premier, oscille, comme l’écrit The Guardian, entre Joy Division, King Krule et PJ Harvey. Nilüfer Yanya se retrouve alors à partir dans une tournée mondiale, à faire les premières parties d’Adèle, de The XX ou encore de Mitski et affirme son statut de jeune artiste à surveiller.
Au printemps 2023, et avec son proche collaborateur Will Archer, elle débute l’écriture d’un troisième album. Les sessions se déroulent entre Londres, le Pays de Galle et le sud de l’Angleterre en petit comité. Une manière de se créer une bulle créative. En l’espace de quelques mois, le disque est bouclé et doit sortir à la rentrée sur le label Ninja Tune. Si le nom de l’album n’a pas encore été dévoilé, un premier single est d’ores et déjà en écoute : Like I Say (I runaway). Un morceau texturé avec un riff accrocheur à mi-chemin entre The Smile — le projet solo de Thom Yorke et Jonny Greenwood de Radiohead — et Kate Bush.
Alors pourquoi il faut garder les oreilles ouvertes pour Nilüfer Yanya ? Car elle fait partie des artistes britanniques les plus novatrices de sa génération, une musicienne l’on peut classer aux côtés de James Blake et Arlo Parks. L’Anglaise est capable de mixer des influences variées (jazz, soul, rock, grunge, etc.) et de les digérer pour créer des morceaux hybrides aux multiples accents sonores. C’est facile de copier ses idoles pour recréer leurs sons, mais c’est mille fois plus dur de s’en inspirer pour construire son propre univers musical.