Foster The People : « Avec cet album, nous voulons fédérer les gens » (Interview)

Demain c’est le grand jour : Foster The People revient avec un troisième album intitulé « Sacred Hearts Club ». europe2.fr a profité de leur récent passage à Paris pour s’entretenir avec les membres du groupe et les interroger sur ce nouveau projet musical. Rencontre.

On la connait toujours par cœur et on ne se lasse pas de la fredonner. Avec « Pumped Up Kicks », Foster The People a connu la gloire dès son premier album, « Torches », publié en 2011. Portée par des sifflements innocents et une mélodie sautillante qui contrastent singulièrement avec la noirceur du texte, la chanson est aujourd’hui devenue un véritable tube planétaire. Boosté par le succès, le groupe Californien emmené par Mark Foster avait relevé haut la main le défi du deuxième album (« Supermodel », 2014) et après plus de deux ans sur la route, a pris le temps de peaufiner la suite. Suite au départ du bassiste Cubbie Fink, Foster The People a officiellement intégré dans ses rangs Sean Cimino et Isom Innis, respectivement guitariste et claviériste additionnels de longue date sur les tournées du groupe. Il y a quelques jours, la formation était de retour sur le sol français pour venir présenter « Sacred Hearts Club », son tout nouvel album à paraitre ce vendredi 21 juillet. Un album qui d’ailleurs, risque fort de surprendre de par la diversité de ses influences, à l’image des premiers singles « Doing It For Money » et « Loyal Like Sid & Nancy ». Juste avant de monter sur la scène de l’Elysée Montmartre pour un concert archi sold-out, Foster The People nous a gentiment reçu dans sa loge. L’occasion pour europe2.fr d’échanger avec le quatuor et d’en savoir un peu plus sur ce fameux « Sacred Hearts Club »…

europe2.fr : Salut Foster The People ! « Sacred Hearts Club » sort dans quelques jours. Est-ce que vous pouvez m’expliquer comme est né ce nouvel album ?

Isom Innis (claviériste) : On a commencé à travailler dessus pendant l’automne 2014, quasiment dès la fin du Supermodel Tour. Au lieu de rentrer chez nous et de faire un break, on a filé en studio et on a commencé l’écriture de l’album suivant.

Mark Foster (chanteur) : Tout a commencé lorsqu’Isom m’a envoyé un premier enregistrement, avec juste quelques beats, et moi j’ai ajouté la mélodie. Je suis retourné dans l’Ohio là où j’ai grandi, à Cleveland dans la maison de mes parents. C’était la première fois depuis 15 ans, parce que je vis à Los Angeles. J’ai déménagé mon studio là-bas, j’avais cette envie de retrouver mes racines, de retourner à l’endroit où la musique avait commencé à prendre une place très importante dans ma vie. Donc c’était vraiment intéressant d’être là-bas, avec mes petits frères qui rentraient de l’école, mon studio dans ma chambre… C’est à ce moment-là qu’on a composé « Pay The Man », c’est la seule bonne chanson qui soit ressortie de cette expérience d’ailleurs !

Isom Innis : Oui, mais on a réalisé qu’avec cette chanson, on tenait quelque chose d’intéressant. Ça nous a donné plein d’autres idées.

europe2.fr : Ça a donc été le point de départ ?

Mark Foster : Oui, plus ou moins. Je me souviens qu’au début quand on a commencé cet album, les chansons avaient une ambiance assez années 60, très psychédélique. Après quelques mois, on a naturellement incorporé des sonorités hip hop. Au bout d’un moment, on s’est retrouvés avec deux albums très différents : l’un était super électro et hip hop, et l’autre était très psychédélique, avec beaucoup plus de guitares et de batterie. On s’est alors demandés si on allait sortir deux albums en même temps, du genre deux parties totalement différentes l’une de l’autre. On a finalement décidé que le mieux était de faire un seul et unique album et de mélanger tout cela, ce qui était assez difficile parce que certaines chansons sont musicalement très différentes. Mais vu la manière dont les gens écoutent la musique aujourd’hui, je trouve ça excitant de ne pas pouvoir dire vraiment « c’est un album rock » ou « c’est un album pop » ou hip hop ou peu importe. Aujourd’hui, les gens écoutent tous styles de musiques, certains ont grandi en écoutant du jazz, du rock, du classique, du hip hop, ils sont ouverts à tous ces styles musicaux différents. Je pense donc que ce n’est pas perturbant pour le public. On a mélangé les styles musicaux sur cet album, de manière tout à fait consciente et volontaire, parce qu’on a envie d’embarquer les gens avec nous et toutes nos influences.

europe2.fr : Trois ans se sont écoulés depuis la sortie de « Supermodel », l’album précédent. Maintenant que vous êtes de retour avec un nouveau projet, êtes-vous plutôt confiants ou anxieux ?

Mark Foster : Je pense que ce qui nous importait vraiment avec cet album, c’était de prendre notre temps. On voulait se lancer des défis, évoluer et s’impliquer au maximum dans ces nouvelles chansons. Alors on n’a pas trop pensé au reste jusqu’à présent, on a juste essayé de se préoccuper d’une seule chose : faire de bonnes chansons. On ne voulait surtout pas se mettre la pression et se dépêcher de sortir un nouvel album juste pour écrire rapidement le successeur de « Supermodel ». On a pris notre temps, on s’est vraiment interrogés pour savoir comment on voulait évoluer en tant que groupe, et ce que nous avions envie de faire ensuite artistiquement parlant. Maintenant, on est fiers de cet album donc notre travail est accompli.

europe2.fr : Que signifie le titre de l’album, « Sacred Hearts Club » ?

Mark Foster : Ça évoque les gens qui vivent leur vie d’une manière qui n’est pas forcément conforme aux attentes de la société. Je ne parle pas nécessairement des artistes bien sûr mais de n’importe qui se sentant outsider, les gens qui ne rentrent pas dans des cases. Ceux qui ne suivent pas ce qui apparait comme normal aux yeux de la société, ceux qui veulent vraiment tracer leur propre chemin, peu importe quel est leur chemin. Qu’ils aiment rester éveillés toute la nuit à boire de l’absinthe, ou écrire de la poésie, faire un footing de 5km, faire une randonnée dans les bois ou faire de la plongée, ou encore qu’ils rêvent d’aller explorer l’espace. Bref, les gens qui recherchent la beauté, qui essayent de tout leur cœur de toucher, de voir, de sentir tout ce que la vie a à offrir.

europe2.fr : Vous avez récemment dit que vos nouvelles chansons avaient été écrites pour apporter de la joie et de la positivité à une époque où le monde en avait bien besoin. Doit-on comprendre que cet album a été influencé par le climat politique actuel ?

Mark Foster : Absolument. Ça a été l’une de nos plus grosses sources d’inspiration pour l’écriture de cet album. J’ai l’impression que les deux dernières années ont été une succession de tragédies pour le monde entier. Que ce soit la crise des réfugiés en Syrie, la montée du nationalisme, l’idée que les hommes riches blancs et hétéros pensent qu’ils ont le pouvoir sur tout le monde… Partout, on observe que le sexisme, le racisme, l’homophobie, sont encore très implantés dans les mentalités. J’ai eu le sentiment que les gens n’en pouvaient plus. Avec cet album, nous voulons fédérer les gens, et il n’y a rien de plus fédérateur que la musique. Tu peux chanter à tue-tête avec un mec qui n’a pas du tout la même histoire que toi, qui ne parle pas la même langue que toi, qui n’a pas la même religion, qui n’a rien en commun avec toi et ça n’a aucune importance. C’est toute la magie de la musique, c’est extrêmement puissant. Je pense même que parfois, la musique peut soigner. Elle peut aider à réparer les blessures, à aller de l’avant. Et je pense qu’en ce moment, le monde en a bien besoin.

europe2.fr : Cela fait maintenant presque dix ans que vous avez formé Foster The People. Quelles leçons avez-vous tiré de ces années dans l’industrie de la musique ?

Mark Foster : Pour être honnête, je ne pense pas avoir appris tant de choses que ça au sujet de l’industrie de la musique. Les vraies leçons qu’on a apprises, c’est en tournée, en allant au contact des gens dans le monde, en rencontrant des personnes aux cultures et aux religions différentes des nôtres. En voyant comment les gens vivent, comment les gens pensent, les différentes coutumes et philosophies, les différentes manières de gouverner un pays, la nourriture, les livres et l’art à travers le monde. On a expérimenté des trucs qu’on n’aurait jamais vécu ou appris en restant chez nous à Los Angeles. Ce sont des choses que tu ne peux pas lire dans les livres, ce sont des choses qui se vivent.

europe2.fr : Que représente la musique pour vous aujourd’hui ?

Sean Cimino (guitariste) : Moi j’ai le sentiment, comme le disait Mark, que c’est une opportunité vraiment formidable pour rencontrer des gens. Tu crées de la musique, et puis tu vas au Sacré Cœur – désolé si j’écorche le nom – et les gens te reconnaissent dans la rue, comme tout à l’heure. Les gens te reconnaissent pour ta musique et entrent en contact avec toi, la musique crée des liens entre des gens qui ont des cultures différentes. Mon amour pour la musique est beaucoup plus fort aujourd’hui et j’apprécie de pouvoir, grâce à elle, communiquer avec tant de monde.

Isom Innis : Quand on est musiciens et qu’on est en tournée, on se sent un peu comme des diplomates en fait. Quand on monte sur scène dans un pays, on a cette responsabilité d’unir les gens, de délivrer un message. Parfois, le message est même plus important que la musique, d’une certaine manière. Particulièrement sur cet album « Sacred Hearts Club », le message qu’on veut transmettre, c’est qu’on s’en fout que tu sois noir, blanc, métisse, on s’en fout que tu sois juif, musulman, chrétien, on s’en fout que tu sois riche, pauvre, gays, hétéro, peu importe. L’amour est plus fort que la douleur. Si on arrive à s’unir, à s’aimer les uns les autres, à partager nos différences et à s’entre-aider… J’ai l’impression que c’est un peu de notre responsabilité à nous, de diffuser ce message aux gens, de leur rappeler, particulièrement en ce moment. Alors je dirais que pour moi, la musique représente la joie tout simplement ! C’est pour ça qu’on en fait. On fait de la musique parce qu’on adore ça. Je pense que ça, ça n’a pas changé depuis qu’on a commencé ce groupe. On est toujours animés par la même passion, et par la joie de faire ce qu’on aime.

Foster The People, « Sacred Hearts Club » – Sortie le 21 juillet.

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