Écrit par - Publié le 08 Juin 2015 à 07:00

Annoncé comme un retour aux sources par le groupe, Drones est en réalité bien plus que ça. Véritable rouleau compresseur, ce septième album est dense et complexe. europe2.fr vous donne son avis sur ce nouvel opus.

Quand nous l’avions rencontré, Chris Wolstenholme nous avait parlé de la volonté du groupe de « Revenir à un trio guitare-basse-batterie ». Si vous espérez entendre un « Origin Of Symetry 2 » ou « Absolution : Le Retour » passez votre chemin. Bien sûr, par moments, les riffs brillants de Matthew Bellamy, la ligne de basse de Chris et la batterie robotique de Dom nous ramènent plus de dix ans en arrière. Mais il serait réducteur de qualifier Drones de simple album back to the basics. Non, Drones est une démonstration de force. La preuve que Muse sait jouer de son savoir-faire, tirer profit de son histoire, garder le meilleur de ses expérimentations musicales. Après deux derniers albums discutés, le trio britannique prouve qu’il est loin d’avoir perdu de sa superbe. Drones est à ce jour l’un des temps forts musicaux de l’année 2015.

Ce concept-album n’est pas qu’un simple disque de rock. Drones est une odyssée, celle du protagoniste de l’histoire de l’album, engagé dans une lutte (perdue d’avance ?) contre le pouvoir, technologie, l’intelligence artificielle, métaphorisées par ces fameux drones. Mais c’est également une odyssée pour Muse. Tout au long des douze titres de Drones, le trio alterne les genres, les styles, avec deux dénominateurs communs : Une créativité et une assurance rarement vues jusque là. Que ce soit lors des envolées electro-rock de Dead Inside et Mercy, ou dans les morceaux de rock bruts portés par des riffs de guitare stratosphériques, comme dans les excellents Reapers, Psycho ou The Handler, Muse fait le boulot sans aucune fausse note. Que dire du queenesque The Handler, qui nous plonge dans la détresse d’un homme opprimé par des forces qui le dépassent ? Les mélodies sont travaillées comme rarement et la voix de Matthew Bellamy n’a rien perdu de sa puissance.

Alors que The Resistance et The 2nd Law étaient assez inégaux, la qualité des morceaux de Drones est permanente. L’album est divisible en deux parties, séparées par un discours de JFK sur la liberté dont doit jouir l’homme. Le récit de l’asservissement du protagoniste aux forces maléfiques que métaphorisent les drones est sombre, torturé, pessimiste, mais musicalement parfait. L’espoir renaît lors d’une deuxième partie plus audacieuse, avec des titres comme Aftermath ou Revolt. Mention spéciale au refrain de Revolt, l’un des plus entraînants que le groupe n’ait jamais produit. Aftermath est, avec Dead Inside, la seule chanson de l’album à aborder le thème de l’amour. Elle apparaît comme un havre de paix après la hargne des morceaux qui la précèdent. Le protagoniste de l’histoire renoue avec la passion, au cours d’une ballade portée par des notes de guitare magnétiques et une montée en puissance salvatrice. Le très attendu The Globalist résume à lui tout seul le voyage romantique que nous vivons en écoutant l’album. Durant 10 minutes et composé de trois parties, le morceau débute par un hommage non dissimulée à la musique d’Ennio Morricone, avant de se lancer dans une apocalypse métal rappelant les grandes heures d’Origin Of Symetry, pour finir sur une ballade piano emplie d’une grâce que n’aurait pas reniée Freddy Mercury. Un chef d’œuvre relatant la destruction de notre monde.

Drones se conclue sur un titre éponyme à la tonalité sacrée et mystique, une élégie a capella où Matthew Bellamy fait l’épilogue de l’aventure que nous venons de vivre « Nos vies entre vos doigts et vos pouces, pouvez-vous ressentir quelque chose ? Êtes-vous mort à l’intérieur ? Maintenant vous pouvez tuer, depuis le confort de vos foyers, avec des Drones. Amen ». Il a beau durer un peu moins d’une heure, le voyage entrepris lors de l’écoute de Drones, se poursuit bien au-delà dans nos esprits. Cette plongée dans l’obscurité de l’âme humaine est une franche réussite. Alors non, ce n’est pas le Muse de Showbiz, ce n’est pas le Muse d’Origin Of Symetry ou d’Absolution. Ce que nous entendons ici est le Muse de Drones. Un groupe qui n’est certainement pas prêt d’achever son propre voyage, débuté il y a plus de vingt ans.