Nous sommes en 2006, les Ipod Nano sont partout, Daniel Powter et son « bad day » nous inspirent à nous prendre pour des stars de ciné dans le métro pendant que Daniel Craig se glisse dans le costume de James Bond pour la première fois (belle année pour les Daniel, visiblement). Au milieu de tout ça, Muse nous offre son quatrième album studio, Black Holes and Revelations : au programme, des morceaux efficaces tels que Starlight mais aussi (et surtout) Supermassive Black Hole. Le titre, qui d’ailleurs, retentit toujours avec la même puissance en live, évoque la célébrité : Matt Bellamy revient sur la popularité du groupe (qui ne cesse d’accroître) et visiblement, l’idée d’être célèbre ne l’attire pas tant que ça : « Glaciers melting in the dead of night / And the superstars sucked into the super massive (you set my soul alight) », que l’on peut traduire par « Les glaciers fondent au cœur de la nuit / Et les superstars aspirées dans le super massif (tu as enflammé mon âme) ». Autrement dit, les superstars finissent par être aspirées par le néant… on comprend que peut-être, Matt et sa bande préfèrent jouer la musique qu’ils aiment sans pour autant se laisser aller à la célébrité.
Côté chiffres, c’est un succès pour l’album. Auprès des critiques, Black Holes and Revelations s’impose tranquillement, obtenant les éloges de médias tels que NME ou encore Rolling Stone.
L’effet Twilight
Deux ans plus tard, le monde entier n’a qu’un mot à la bouche – Twilight. Tout le monde connait l’histoire mais, pour les retardataires, voici un recap rapide : Bella Swan débarque à Forks, chez son père. Là-bas, elle croise Edward Cullen qui, clairement, est bien trop pâle pour être honnête. On vous le donne dans le mille, Edward est un vampire centenaire et, tout au long de la saga, le seul débat qui animera les soirées sera celui détermine qui d’Edward ou de Jacob gagne le plus de points. Adapté au cinéma, Twilight s’offre un casting prestigieux (Robert Pattinson, Kristen Stewart, Anna Kendrick) et surtout, une bande-originale travaillée : Paramore signe deux morceaux (l’indétronable Decode, sans oublier I Caught Myself) tandis que Supermassive Black Hole habille une scène qui deviendra culte – celle du match de baseball (interrompu) des Cullen. Oui, pour le plaisir (coupable) de chacun, on vous la remet :
A partir de là, le morceau de Muse grimpe en popularité : pour vous donner une idée, au cours des deux ans et demi qui ont précédé la sortie du film Twilight, la chanson cumulait un peu plus de 150 000 téléchargements. L’année suivant sa sortie, le titre s’est vendu à plus de 300 000 exemplaires. Cliff Burnstein, le manager de Muse, déclarera plus tard au magazine Billboard : « Il y a quelque temps, alors que le groupe jouait en Arizona, nous avons invité Stephanie Meyer à un concert. La réalisatrice de Twilight, Catherine Hardwicke, voulait utiliser « Supermassive » dans une très longue scène, avec peu de dialogues au premier plan. Nous nous sommes dit : « C’est amusant ; c’est une femme sympathique qui écrit ces livres, c’est une de nos fans, impliquons-nous là-dedans ». Personne ne s’est vraiment dit à l’époque : « C’est une énorme opportunité ».
La beauté de l’histoire, c’est que Twilight a propulsé au sommet des charts un morceau qui, au fond, détaille les travers de la célébrité. Alors que le titre s’est imposé comme l’un des classiques intemporels de Muse (souvent attendu en live), Supermassive Black Hole continue de se ré-inventer – sous toutes les formes. Par exemple, en 2019, lorsque le trou noir supermassif qui se trouve à l’intérieur du noyau de la galaxie Messier 87 -dans la constellation de la Vierge- fut le premier à être directement imagé, Matt Bellamy avait -non sans humour- publié la cliché en commentant « Trou noir supermassif, enfin repéré ».