Placebo, c’est l’histoire de deux mecs hauts en couleur, d’une rencontre hasardeuse dans le métro londonien et d’une tournée avec David Bowie. Placebo, c’est une histoire d’amitié, de glamour et de décadence, de rock’n roll provocant et de frustration adolescente. Ce cocktail explosif a donné naissance en 1996, à un premier album déjà surprenant et redoutablement puissant. Dix ans plus tard, le groupe a publié son premier best-of, recueil de ses meilleurs singles réunis sous le nom de Once More With Feeling. Nous voilà maintenant en 2016 et incontestablement, la seconde décennie de Placebo a été tout aussi productive. En 2006, le groupe frappe fort avec l’excellent Meds, dans lequel il examine à la loupe les aspects les plus noirs de son âme. Puis en 2009, il entame sa renaissance sur Battle For The Sun et cherche enfin à ramener un peu d’éclaircies dans l’univers sombre qu’il s’est construit. Avec Loud Like Love, il se montre résolument plus optimiste sur l’avenir et semble prêt à ouvrir une nouvelle page de sa vie. Ces vingt ans de carrière, Placebo les résume sur un nouveau best-of, intitulé A Place For Us To Dream.
« Pure Morning », « The Bitter End », « Song To Say Goodbye », « Protège-Moi », « For What It’s Worth », « A Million Little Pieces »… Brian Molko et Stefan Olsdal reviennent sur les moments forts de leur histoire. Le cap de la quarantaine passé, le groupe est devenu plus mature, plus sage, laissant loin derrière lui la rage adolescente qui caractérisait les premiers albums. Au grand désespoir de certains, peut être, qui leur reprochent d’avoir perdu la fougue des débuts. Mais si les batteurs se sont succédés, le duo de Brian Molko et Stefan Olsdal a toujours tenu bon, sans jamais tomber dans la routine ou la facilité. S’éloignant doucement du mythe sex, drugs and rock’roll, Placebo aspire désormais à plus de paix et a envie de faire rêver : ce best-of est un cadeau aux fans, comme un refuge paisible dans lequel chacun peut trouver sa place.
Et côté nouveautés alors ? Et bien aujourd’hui également, Placebo publie un nouvel EP de six titres inédits, Life’s What You Make It. L’album s’ouvre sur le titre éponyme, une reprise du groupe Talk Talk à l’ambiance quelque peu psychédélique. S’ensuit le nouveau single de Placebo « Jesus’ Son », un hymne lumineux et optimiste qui présente un groupe revigoré. Le EP contient par ailleurs deux enregistrements live de « Twenty Years », évidemment. Le premier a été capté lors du Europavox Festival de Clermont-Ferrand en mai 2015, tandis que le second est une version piano-voix enregistrée à Moscou en 2016. Quelques notes de piano entêtantes, le timbre suave de Brian Molko, Placebo s’affirme toujours comme une des valeurs sûres du rock – si toutefois certains avaient encore l’idée absurde d’en douter. Sur la quatrième piste, Placebo a choisi de revisiter le titre « Autoluminescent ». De sa voix nasillarde et profondément émouvante, Brian Molko martèle les mots de Rowland S Howard sur un rythme hypnotique. « Song #6 » vient conclure la tracklist de l’EP avec une jolie montée progressive et surprend par ses sonorités électroniques, assez inhabituelles chez Placebo. Le duo emprunte ici une direction musicale qu’il compte visiblement explorer un peu plus à l’avenir.
Vingt ans de carrière plus tard donc, Placebo parvient à surprendre, encore et toujours. Et excelle surtout dans l’art d’émouvoir et de captiver l’auditeur, à grand renfort de riffs lourds et excités. L’ensemble de ce nouvel EP manque certainement de grosses guitares saturées, de hargne et de fureur, mais le groupe est définitivement passé à autre chose et s’y livre différemment, de manière plus pudique et réfléchie. Placebo évolue constamment, tout en conservant l’identité qui lui est propre. Certes, le timbre inimitable de Brian Molko y est pour beaucoup, mais l’originalité musicale réside surtout dans l’atmosphère poétique des morceaux et des paroles empreintes de mélancolie et de romantisme exacerbé. La réputation du groupe n’est plus à faire et le duo s’octroie maintenant un nouveau souffle. Moins tourmenté, Placebo semble être arrivé à un tournant de sa carrière et sans renier les origines sur lesquelles s’est bâtit son succès, il suggère son envie d’explorer de nouveaux horizons. Et c’est ce qu’on aime chez Placebo. C’est ce qui les rend, années après années, toujours aussi excitants. « There are twenty years to go, the best of all I hope… » Dans quelques jours, le groupe britannique se lancera dans une grande tournée anniversaire, qui passera par la France au mois de novembre. Voilà donc de quoi patienter quelques mois avant, on l’espère, la sortie prochaine d’un huitième LP…