Le 21 octobre dernier, Taylor Swift publiait son dixième album studio, Midnights. Extrêmement attendu, ce dernier signe son retour à une pop pure - digne de 1989.
Midnights est-il le meilleur album de T. Swift ? Le débat est ouvert. Difficile de vraiment départager les différents opus publiés par la chanteuse qui, depuis des années, prouve à chaque sortie qu’elle est capable de se surpasser. L’on se souvient de 1989, de sa pop affranchie et de son intemporalité. Difficile d’oublier Reputation, véritable statement après des années de silence médiatique. Folklore, pépite indé sortie en 2020 a notamment réussi l’exploit de convertir le monde entier à la plume de Swift tandis que la ré-édition de Red (portée par une version longue et poignante de All Top Well) a su se faire une place de choix dans les classements. Bref, Swift est de ces artistes qui, inévitablement, ne trouvent de véritable compétition qu’en eux-mêmes. Quelques jours après la sortie de Midnights, la question est sur les lèvres de tous ceux qui se font appeler les « Swifties » : alors, Midnights est-il son meilleur album ? Peut-être bien.
S’il fallait laisser les chiffres parler, évidemment que Midnights gagnerait sans effort. Pour rappel, l’opus est devenu l’album le plus streamé en 24h sur Spotify. Mais, ce n’est pas son unique force : « Swift s’immisce dans sa propre mythologie de manière convaincante et sophistiquée », écrit notamment Buzzfeed dans un essai destiné à prouver que ce dixième chapitre dans la carrière de l’artiste surpasse tous les autres.
Au-delà des millions de streams cumulés, si l’on se plonge (vraiment) dans les notes qui composent Midnights, difficile de manquer certaines références à ses morceaux précédents. Le plus flagrant ? Question…? Qui, vous l’aurez peut-être saisi dès la première écoute, sample Out of the Woods (1989). Taylor Swift a t-elle samplé l’un de ses propres morceaux ? Clairement. Et, ce n’est d’ailleurs pas le seul exemple.
De cette collection, ce sont ses fans qui en parlent le mieux. Ainsi, depuis vendredi, nombreux sont les internautes qui s’amusent à chercher les similitudes musicales entre les nouveaux morceaux et ceux qui, au fil des années, ont ponctué la carrière de Swift. Il y a d’abord Lavander Haze qui rappelle I Think He Knows (Lover). Et puis, Vigilante Shit – qui nous ramène à l’époque où Blank Space régnait sur les charts. Les premières notes de Anti-Hero s’inspirent aisément de Only The Young tandis que Would’ve, Could’ve, Should’ve rejoint Betty. La liste est longue mais s’il ne fallait retenir qu’une chose, ce serait celle-ci : habituée à construire des ponts entre ses morceaux dans son écriture (Love Story x Call it What You Want, All Too Well x Lover, Red x Daylight), Swift passe ici au niveau supérieur en allant au-delà de la narration – comme pour rendre hommage à ses presque vingt ans de carrière.
Alors que certains détracteurs pourraient jouer la carte de l’auto-plagiat, du manque d’inspiration ou de créativité comme un mauvais joueur hurlerait ‘contre-uno’, difficile pourtant de voir les choses sous cet angle. Pourquoi ? Simplement Swift n’est pas le genre à se reposer sur ses lauriers, bien au contraire. Swift est celle qui, sortie de la cérémonie des Grammy Awards en 2014 s’est jetée à corps perdu dans la création de 1989 – qui lui vaudra la récompense qui, ce soir-là, lui avait échappé. Swift est celle qui, en apprenant que Reputation ne serait pas retenu pour cette même cérémonie quelques années plus tard s’est exclamée depuis son sofa « Je vais faire un meilleur album ». Swift est celle qui, dans Miss Americana, répète que les artistes féminines doivent constamment se réinventer : « Be new to us, be young to us ». Bref, s’il y a deux choses que l’on ne pourra jamais retirer à Taylor Swift, ce sont sa créativité et sa capacité presque inhumaine à raconter ses histoires – mais aussi celles des autres.
En samplant ses vieux morceaux, en les connectant à cette toute nouvelle ère de sa carrière, l’interprète de Shake it off ne se contente pas jouer avec ses propres titres, elle ne se satisfait pas uniquement du simple fait de les ré-inventer à l’infini. En fait, elle prouve surtout qu’après des années passées à se ré-approprier sa propre musique, elle est libre d’en faire ce qu’elle veut. Elle aurait pu chanter « Vous pouvez racheter tous mes masters, personne ne saura exploiter ma musique mieux que moi » que l’effet aurait été le même.
Bref, Midnights est probablement le meilleur album (à date) de Taylor Swift pour la simple est bonne raison qu’il n’est pas uniquement un recueil de morceaux nés d’insomnies. Il est aussi la synthèse de dix albums, d’une centaine de morceaux et de milliers d’heures passées en studio – tout ce qui, au fond, fait de Swift l’artiste qu’elle est. Celle qui, en 2016, écrasait toutes les versions d’elles-mêmes leur rend aujourd’hui le plus beau des hommages.